La fable ci-dessous est tirée du livre de Marcus Buckingham et Curt Coffman : »Manager contre vents et marées – Développer les talents dans l’entreprise ». Les auteurs y démontrent, enquête à l’appui, que « le management est un métier qui consiste à gérer des talents », une petite phrase anodine qui « constitue en fait une véritable révolution dans la manière de concevoir le rôle du manager… »
Un scorpion ne sachant nager voulait traverser une mare.
Il rencontra une grenouille et lui demanda poliment : « pourriez-vous me prendre sur votre dos et me faire traverser la mare ? »
« Je pourrais bien le faire » répliqua la grenouille, « mais je dois refuser, car sitôt embarqué, vous me feriez passer de vie à trépas. »
« Mais pourquoi ferais-je une telle sottise ? » demanda le scorpion. « Ce n’est évidemment pas mon intérêt de vous piquer, parce que votre mort entraînerait ma noyade. »
Ebranlée par une logique d’un si grand bon sens, la grenouille hésita.
Sans doute, dans une circonstance aussi particulière, le scorpion saurait se retenir de la frapper. Ecartant finalement ce risque mortel de ses pensées, la grenouille accepta d’embarquer un passager aussi raisonnable vers la rive opposée.
Arrivés au milieu de la mare, on vit alors le scorpion faire des petits mouvements avec sa queue et… frapper la grenouille.
Mortellement blessée, la grenouille se lamenta : « pourquoi m’avez-vous piquée ? N’était-ce pas votre intérêt de me garder en vie ? Auriez-vous subitement appris à nager ? »
« Hélas non » dit le scorpion qui s’enfonçait dans la mare, « mais je suis un scorpion. Je devais vous piquer. C’est dans ma nature. »
Moralité : Les gens ne changent pas
Ne perdez pas votre temps à tenter de compléter ce qui leur manque
Efforcez vous de mettre en valeur ce qu’ils sont
C’est déjà assez difficile comme cela
Existe-t-il un lien entre satisfaction et performance ?
Quelles sont les attentes au travail les plus importantes des employés les plus performants?
Comment les meilleurs managers font-ils pour les sélectionner, les orienter et les conserver ?
Comment les meilleurs managers transforment-ils le talent de leurs employés en performance durable ?
Buckingham et Coffman, membres de l’organisation GALLUP, ont cherché les réponses à ces questions en étudiant en profondeur l’opinion exprimée par plus d’un million d’employés et 80 000 managers appartenant à 400 entreprises différentes. Ils ont sélectionné 12 questions essentielles pour mesurer l’engagement des meilleurs employés de façon discriminante. Puis, ils ont croisé cette mesure de satisfaction des employés avec les résultats économiques fournis par 24 entreprises différentes représentant plus de 2 500 unités de travail.
Qu’ont-ils donc trouvé ?
Un premier point capital, démonstration d’une apparente banalité : climat de travail et résultats économiques sont liés !
Un deuxième point plus intéressant encore : l’engagement des employés, mesuré grâce aux 12 questions, dépend plus de leur unité de travail que de leur entreprise. Là où la satisfaction des attentes les plus importantes des employés est la plus élevée, les résultats économiques sont les meilleurs.
Autrement dit, c’est la relation de travail entre les employés et leur manager direct au sein de la même unité qui produit le plus de valeur ! Le manager direct est la clé.
Comment fonctionnent donc les meilleurs d’entre eux ?
Buckingham et Coffman en ont écouté des milliers. Ils reviennent de ce long voyage sans théorie nouvelle ni formule toute faite mais avec un point commun majeur : la volonté de prendre en compte les personnes !
Le rôle principal d’un manager est comparable à celui d’un catalyseur. En chimie, le catalyseur accélère la réaction entre deux substances pour en créer une troisième. En management, le manager ‘’catalyseur’’ accélère la réaction entre les talents de ses employés et les objectifs de l’entreprise pour créer de la performance durable.
Comme le suggère la fable du scorpion et de la grenouille, prendre en compte les personnes signifie tenir compte de ce que sont les personnes. Comme chaque personne est unique, les talents de chacun sont différents. Et toute fonction dans l’entreprise requiert les talents appropriés pour y exceller.
De cette réalité toute simple, les meilleurs managers font quelque chose de révolutionnaire : ils en tiennent compte !
– Lorsqu’ils sélectionnent ou orientent leurs employés, ils sont plus à la recherche des talents appropriés que des diplômes ou de l’expérience.
– Lorsqu’ils définissent les objectifs, ils raisonnent plus en terme d’excellence qu’en terme de moyenne. Ils considèrent les moyennes et les standards comme des freins au progrès personnel. Ils accordent facilement leur confiance.
– Lorsqu’ils entretiennent la motivation, ils se concentrent davantage sur les points forts que sur les points faibles. Ils ne cherchent pas à rendre leurs employés parfaits en tous points.
– Ils envisagent d’abord le développement personnel comme une recherche d’adéquation entre les talents personnels et ce que peut offrir l’organisation de l’entreprise, pas comme la recherche du prochain barreau supérieur disponible dans l’échelle hiérarchique.
– Ils respectent leurs collaborateurs en s’intéressant réellement aux forces de chacun d’entre eux. Ils encouragent chacun à devenir responsable de ce qu’il est et à réussir. Ils s’efforcent de traiter chacun comme une exception.
– Enfin, ils sont exigeants et directs. Si la formation et le soutien ne suffisent pas à corriger le défaut de performance, ils perdent peu de temps et traitent clairement la question, d’abord par une tentative de repositionnement professionnel. La recherche du bon lien entre talents et emploi leur permet de raisonner en terme d’inadéquation plus qu’en terme de faute de l’employé, ce qui est libérateur pour tout le monde.
En ces temps de recherche frénétique de performance économique, il est réconfortant de rappeler que le chemin de la performance passe par l’homme.
Pas un homme »objet », docile rouage répétant les gestes qu’une organisation mécanique et lointaine a pensés pour pallier ses nombreuses imperfections. Pas un homme théorisé, interchangeable, capable de tout pourvu qu’il transpire suffisamment. Mais un homme unique, libre, doté de raison et d’affectivité, capable de s’engager.
Il est réconfortant de pouvoir démontrer que des hommes confiés à d’autres hommes avec le souci de mettre en valeur ce qu’ils sont, c’est à la fois efficace et plaisant…
Cette vision positive de l’homme au travail mériterait d’être largement communiquée.