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La mort du rat

Film de Pascal Aubier, primé au Festival d’Oberhausen en 1973

Fable politique grinçante sur le taylorisme et ses conséquences : un ouvrier enchaîné aux cadences se rebiffe, est puni, brutalise sa femme, qui gifle son gamin, qui donne un coup de pied à son chien, qui saute sur le chat qui tue le rat.

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Bien-être et efficacité au travail

Quelles mesures proposer pour améliorer les conditions de santé psychologique au travail ?

A cette demande du Premier Ministre, un groupe de « praticiens », composé de Henri LACHMANN, Christian LAROSE et Muriel PENICAUD, vient de répondre par la publication d’un rapport intitulé « Bien-être et efficacité du travail ». Ce rapport est en tout point remarquable et devrait être une source d’inspiration pour l’ensemble des décideurs intéressés par cette question. Les auteurs ont travaillé de façon pragmatique, sur la base d’auditions de 62 personnes qualifiées, dirigeants d’entreprises du secteur privé, partenaires sociaux et instituts spécialisés.

rapport bien etreTélécharger le rapport

Bien etre et efficacite au travail

Après avoir rappelé qu’«un état de stress survient lorsqu’il y a déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face», les auteurs précisent les enjeux de leur étude :  » Parce que social, santé, organisation et management sont indissociables…Investir dans la santé au travail est d’abord une obligation sur le plan humain : de plus, ce n’est pas une charge, c’est un atout pour la performance » car « le sujet de la santé au travail réconcilie le social et l’économique » et le véritable défi à relever concerne « le bien-être des salariés et leur valorisation comme principale ressource de l’entreprise. »

Pour répondre aux 11 « familles » de facteurs de stress décrites en préambule, dix propositions sont avancées :

1. L’implication de la direction générale et de son conseil d’administration est indispensable.
L’évaluation de la performance doit intégrer le facteur humain, et donc la santé des salariés.

2. La santé des salariés est d’abord l’affaire des managers, elle ne s’externalise pas.
Les managers de proximité sont les premiers acteurs de santé.

3. Donner aux salariés les moyens de se réaliser dans le travail.
Restaurer des espaces de discussion et d’autonomie dans le travail.

4. Impliquer les partenaires sociaux dans la construction des conditions de santé.
Le dialogue social, dans l’entreprise et en dehors, est une priorité.

5. La mesure induit les comportements.
Mesurer les conditions de santé et sécurité au travail est une condition du développement du bien-être en entreprise.

6. Préparer et former les managers au rôle de manager.
Affirmer et concrétiser la responsabilité du manager vis-à-vis des équipes et des hommes.

7. Ne pas réduire le collectif de travail à une addition d’individus.
Valoriser la performance collective pour rendre les organisations de travail plus motivantes et plus efficientes.

8. Anticiper et prendre en compte l’impact humain des changements.
Tout projet de réorganisation ou de restructuration doit mesurer l’impact et la faisabilité humaine du changement.

9. La santé au travail ne se limite pas aux frontières de l’entreprise.
L’entreprise a un impact humain sur son environnement, en particulier sur ses fournisseurs.

10. Ne pas laisser le salarié seul face à ses problèmes.
Accompagner les salariés en difficulté.

Chaque proposition est détaillée en lignes directrices dont chaque entreprise peut s’inspirer en tenant compte des particularités de son métier et de sa culture.
Nous aimerions souligner ici la cohérence des différentes propositions avancées pour reconnaître et renforcer le rôle des managers d’équipe. Toutes sont dignes d’intérêt. En voici quelques unes à titre d’exemple :

Compléter les critères d’attribution de la rémunération variable aux managers dirigeants : la performance économique ne peut être le seul critère d’attribution de la rémunération variable. La performance sociale doit aussi être prise en compte, incluant notamment des indicateurs de santé, de sécurité et de conditions de travail – par exemple le turn over, les accidents du travail, la satisfaction des salariés, la promotion interne ;

Valoriser le rôle du collectif dans l’évaluation de la performance : des indicateurs de performance exclusivement individuels nuisent à l’efficacité collective du travail et au lien social ;

Définir le bon niveau et la bonne utilisation des procédures de reporting, pour éviter de déresponsabiliser les managers et de réduire excessivement le temps consacré au management des équipes

Atténuer le caractère excessivement matriciel de certaines organisations : chaque salarié doit pouvoir identifier clairement son supérieur hiérarchique, faute de quoi il ne sera pas en mesure de dire quelle est sa place dans l’entreprise. Dans un organigramme trop exclusivement matriciel, la relation de proximité entre le salarié et son manager immédiat n’est plus garantie.

Réaffirmer les compétences de décision et pas seulement d’exécution du manager de proximité : le manager de proximité ne doit pas être simplement une courroie de transmission. Il doit disposer de marges d’adaptation et de décision pour optimiser l’efficacité et la cohésion de son équipe.

Généraliser les espaces de discussion sur les pratiques professionnelles, sous la forme de groupes de travail sur le métier ou sur le modèle des anciens cercles de qualité, afin de créer des lieux où développer un retour collectif sur le travail et sur la qualité du métier

Systématiser les marges d’autonomie dans l’organisation, y compris dans l’application des process (notamment les ERP) et dans les métiers les plus répétitifs et contraints : à titre d’exemple, une répartition autonome des plages de travail au sein d’une équipe permet d’adapter au mieux la présence de chacun et de ne pas rajouter un facteur de stress par l’imposition d’horaires inadaptés aux contraintes personnelles (déplacements, conciliation avec la vie familiale, modes de garde)

Systématiser les possibilités de recours au supérieur hiérarchique de niveau n+2 et à un responsable de ressources humaines de proximité en cas de problème avec le supérieur hiérarchique immédiat afin d’agir contre le stress généré par des relations interpersonnelles difficiles.

Un impératif : former les managers…

« Il ne peut y avoir de santé au travail sans vrais managers. Il n’y a pas de substitut à un manager. Or les salariés promus managers ne sont souvent ni préparés ni formés à leurs responsabilités de leader d’équipe.

La formation au management proposée dans les écoles de commerce et d’ingénieurs, ainsi que dans les cursus universitaires, n’est pas une formation à la conduite des équipes. D’après une étude réalisée par la commission des titres d’ingénieur, 65% des ingénieurs interrogés estiment que leur formation initiale ne les a pas préparés à « s’intégrer dans une organisation, à l’animer et à la faire évoluer ». Seuls 15% s’estiment sensibilisés par leurs études « aux relations sociales ».
La première exigence est donc d’intégrer systématiquement la dimension humaine dans la formation initiale des futurs managers : d’ici trois ans, les diplômes de titre I ou II délivrés par les écoles de commerce et d’ingénieurs devraient tous inclure obligatoirement un module de formation à la responsabilité sociale et au management d’équipes.
Les entreprises devraient :
– investir beaucoup plus fortement dans des programmes de formation de leurs managers à la conduite des hommes et des équipes, et aux comportements managériaux. Les process et les outils de management ne suffisent pas ;
– accompagner systématiquement la promotion à un poste de manager d’une formation conséquente aux responsabilités sociales et humaines du manager. »

Nous ne saurions mieux dire…

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Lien salariés-employeurs : la rupture ?

Selon la dernière enquête TNS-SOFRES, la rupture du lien entre employeurs et salariés semble consommée. L’étude révèle en tout premier lieu une remise en cause massive du système actuel par les salariés français : les ¾ pensent que face à la crise, le système apporte plus de problème que de solution. La même proportion estime que les intérêts des entreprises (ou de leurs dirigeants) et des salariés ne vont pas dans le même sens. Dans ce contexte de rupture, 43% des cadres considèrent normal le recours à la force des salariés pour faire valoir leurs revendications, (75% pour les ouvriers…)

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Selon TNS-SOFRES, « ces résultats sont nettement plus critiques que ce que nous avions pu mesurer cet été dans une grande enquête « avant / après  la crise » (étude qui mettait néanmoins en évidence un mal-être diffus et une certaine perte de sens). La médiatisation actuelle de la souffrance au travail, suite aux suicides chez Orange, aurait-elle conduit à « cristalliser » ce mal-être, libérant ainsi la critique ? »

La lecture des résultats montre que plus l’entreprise est grande, plus la critique est sévère.

« Les salariés de petites et de grandes organisations (administrations ou entreprises) semblent vivre sur des planètes différentes. Simple effet de la proximité du dirigeant ou moindre exposition aux modes de fonctionnement de l’économie actuelle ? »
A l’inverse, la Fonction Publique d’Etat et l’Industrie, pour des raisons très différentes, cristallisent le mal-être.

Comment recréer ce lien ?

Une autre étude consacrée au lien entre Dirigeants et salariés donne des indications intéressantes. Et tout d’abord une confirmation des attentes des salariés :
« Ainsi, développer plus de liens avec le responsable hiérarchique direct semble être jugé par les salariés comme essentiel ou important (85%). De même que recevoir davantage d’informations sur la stratégie (essentiel ou important pour 86%) ou développer plus de liens avec l’équipe dirigeante de l’entreprise (essentiel ou important pour 84%).
Une forte attente de liens qui passe avant tout par une préférence à une communication plus directe : 78% des citations en faveur d’une prise de parole, en personne, de dirigeants de l’entreprise… et qui fait l’impasse sur les outils de communication virtuels.
Pour recréer cette confiance perdue, les salariés sont en phase avec le « parler vrai ».  Il s’agit pour l’entreprise d’être transparente, pédagogue, d’avancer des preuves, de montrer de la conviction et dans le même temps de faire acte d’humilité/d’authenticité de ton, d’être cohérente entre ses dires et ses actes, ainsi que conviviale. »

Pour dire les choses simplement, le renforcement des liens passe par des relations de proximité, des contacts directs qui sont des occasions de s’écouter et de se parler vrai. Tout dépend donc de la volonté des dirigeants, de leur capacité personnelle à se rendre disponibles et accessibles, et de leur engagement à répercuter en cascade cette personnalisation des relations entre les responsables et leurs équipes.

Des solutions en trompe l’œil

Parmi les cinq domaines de « progrès » retenus par la même étude, le fait de « poursuivre la mutation d’un schéma traditionnel vers un schéma moderne » mérite une attention particulière. Il s’agirait de remplacer :

la fidélité par la mobilité
le rapport affectif et familial par le rapport contractuel
une résistance au changement avec un besoin de sécurité par une facilité d’adaptation et une gestion de la complexité

Si on comprend bien, pour renforcer les liens il faudrait profondément en changer la nature. Vous étiez fidèle, devenez mobile ! Vous aspiriez à des relations naturelles faisant leur place à l’affectivité, vous faites erreur, désengagez-vous et ne misez que sur des relations contractuelles ! Vous aviez besoin de sécurité, ne vous trompez pas, l’entreprise ne peut rien vous garantir, votre sécurité ne dépend que de vous !
La modernité proposée ici ressemble fort à la promotion d’un individualisme utilitariste, quasi darwinien. N’est-ce pas paradoxal ? Plus vous seriez individualiste, plus les liens qui vous relient à votre communauté de travail seraient renforcés…On est loin de la conception de l’entreprise comme « communauté de destin » qui nous semble encore la meilleure réponse à cette problématique.

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Santé mentale et travail

Selon l’Institut National de Veille Sanitaire (INVS), un quart des hommes (24 %) et un tiers des femmes (37 %) souffrent en France de détresse psychique liée à leur travail. « Ce qui est nouveau, c’est le fait que des gens se suicident sur les lieux du travail », déclare Christophe Dejours lors d’une conférence sur le stress. Les suicides semblent être la partie émergée de l’iceberg de la souffrance au travail. Ce professeur éminent, titulaire de la chaire de Psychanalyse-Santé-Travail du CNAM, se passionne pour la recherche des causes des pathologies mentales liées au travail. Ses travaux l’ont amené à mettre en évidence deux facteurs principaux : les méthodes d’évaluation de la performance et les politiques de Qualité Totale.

Christophe Dejours stress au travail /2em partie

Suivons sa démonstration :

Ce qui est en cause, ce n’est pas l’évaluation individuelle, ce sont les méthodes d’évaluation qui ne s’intéressent qu’à la mesure de données chiffrées. Dans un contexte de recherche d’amélioration de performance à tout prix, la pression des gestionnaires combinée à une recherche sincère de justice a pour effet d’éliminer tout ce qui pourrait être subjectif dans l’évaluation de la performance individuelle.

Or, l’essentiel du travail est de nature subjective. L’expérience du travail est l’expérience de la résistance du réel, l’expérience de l’échec. Travailler, c’est échouer, c’est éprouver un sentiment d’impuissance, c’est endurer l’échec. Cette histoire se prolonge à la maison, la nuit…Il n’ y a pas de frontière étanche pour ces états affectifs…

Echouer c’est souffrir…
On ne voit pas un mal de dent passer…
On ne peut pas mesurer les états affectifs, subjectifs…
On ne peut donc mesurer le travail, au mieux, on peut évaluer certains résultats du travail.
Mais on n’obtient pas de résultat tout seul, on a besoin de la coopération des autres.

Or, l’individualisation dégrade la coopération :
elle crée de la concurrence généralisée entre les gens, induit des changements de comportement qui vont jusqu’à la concurrence déloyale. Il s’ensuit la destruction de la loyauté et de la confiance, la destruction de la convivialité. On accepte comme une calamité de participer à des actes que l’on sait répréhensibles. Il en résulte de la solitude, voire de la dé-solation, car c’est le sol commun du sens commun des valeurs communes qui s’effondre…
On a cassé les solidarités de défense : face au harcèlement, personne ne bouge…La solitude face à l’injustice devient de règle. Paradoxalement, les plus vulnérables sont les plus motivés, parce qu’ils croient qu’ils sont en tort…

Quant à la qualité totale, c’est bidon, çà n’existe pas, çà ne marche pas, c’est un idéal…
La conséquence inévitable est qu’elle met dans l’obligation de frauder…
Les gens mentent, consacrent du temps à mentir, à consigner les mensonges sur papier, à mentir par solidarité avec son chef, avec l’Entreprise…
Là encore, l’effet de dé-solation se trouve renforcé…

Quelles réponses apporter à ces critiques non dénuées de fondement ?

Le point commun aux deux causes exposées est une idéologie du management qui, comme toute idéologie, ampute la partie gênante du réel.
Dans le cas de l’évaluation, le déni de réalité tient au refus de juger du travail, et notamment de la coopération dans le travail. Au nom de la justice, pour éviter « la tête du client », on se raccroche à la « vérité » des chiffres, seules réalités prétendues objectives, mais qui ,comme chacun le sait, sont tous faux…Sous prétexte de vouloir éviter les erreurs de jugement, on évite d’apprécier ce qui est essentiel…
On empêche les responsables d’équipe de faire leur métier et on communique de la défiance…

Les pistes de solution sont connues et abondamment illustrées dans le Parcours de Formation IFMP.

Les points clé en sont :

l’existence de règles de fonctionnement explicites, connues de tous et applicables par tous
le choix de critères d’évaluation qualitatifs (non mesurables) et quantitatifs
l’importance donnée à la contribution personnelle au succès collectif
la confiance accordée aux responsables d’équipe pour l’évaluation de leurs collaborateurs sur la base de ces critères
la primauté donnée au dialogue et non au système

Quand ces lignes directrices sont mises en pratique, l’expérience montre que se développe un climat de confiance qui permet de se parler vrai. Dans un tel contexte, les politiques de Qualité Totale peuvent jouer pleinement leur rôle d’aiguillon. La peur de se parler de ce qui échoue s’estompe et le sens général commun du travail, qui consiste à s’améliorer, se trouve valorisé.

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Le puzzle de la motivation

 

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Comment les grands leaders inspirent l’action

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Comment réagir aux incidents de fonctionnement ?

Dans toute communauté, la vie courante est ponctuée d’incidents de fonctionnement :
des bourdes sont commises, généralement sans faire exprès, par inadvertance, manque de temps, parfois même en cherchant à bien faire. Elles sont à l’origine d’un processus de dégradation des relations, abondamment développé dans le parcours de formation IFMP : la perception de ces incidents par ceux qui les subissent entraîne potentiellement des conséquences psychologiques et intellectuelles qui ont à leur tour des conséquences sur l’action. Le doute et la crainte poussent au silence, à l’isolement, au repli sur soi, au désengagement, à la démotivation voire à l’opposition larvée…

Exemple : Dans une entreprise industrielle, une nouvelle commande urgente nécessite de réorganiser la production d’un atelier ; le directeur de production descend dans l’atelier et fait modifier les réglages des machines, modifie l’ordonnancement, sans en avertir le chef d’atelier.
Ce dernier s’était absenté pour suivre une formation au management. A son retour, il est informé des changements par ses subordonnés.
Dans cet exemple, la volonté de bien faire n’est pas en doute. Face à l’urgence, le directeur est réactif, la nouvelle commande sera honorée…
Pourtant, le chef d’atelier va s’interroger :
« Pourquoi le directeur de production a-t-il pris des décisions sans moi ? Pourquoi ne m’a-t-il pas consulté ? Pourquoi ne ma-t-il pas informé ? Est-il donc maintenant normal d’être tenu au courant par ses propres collaborateurs ? Se rend-il compte que ma crédibilité est en jeu ? Le directeur a-t-il voulu me faire passer un message ? Me fait-il suffisamment confiance ? Dois-je lui parler de cet incident ? Finalement, ce n’est pas si grave….je ne vais pas l’ennuyer avec cela …Etc. »

Si d’autres incidents de même nature se reproduisent, la frustration du chef d’atelier va grandir et selon son tempérament et les circonstances :

– il gardera le silence, mais saisira toute occasion pour se protéger et défendre son territoire
– il partagera sa frustration avec ses collègues (dans cette boutique, les chefs font n’importe quoi !)
– il cessera de prendre des initiatives (puisqu’il est si fort là haut, qu’il se débrouille !)
– il demandera sa mutation
– etc.

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Il est assez facile de faire parler les managers de situations similaires de déstabilisation dont ils ont pu être les acteurs ou les témoins. Mais la plupart y voient une sorte de fatalité. « Que voulez-vous, on n’a pas le temps de prendre de gants, il faut aller vite, l’entreprise n’est pas faite pour des gens trop sensibles, il faut apprendre à se protéger, ce serait un signe de faiblesse de se laisser gagner par des états d’âme et après tout, ce n’est pas si grave … etc. »

Attitude quelquefois héroïque et pragmatique, mais le plus souvent consternante d’aveuglement et d’impuissance de la part de ceux qui ont pour fonction de régler la vie d’une communauté de travail, pour rendre plus facile la réalisation de ses objectifs.

En réfléchissant un peu, une première évidence saute aux yeux : les incidents de fonctionnement existent partout, à tous niveaux. Il s’agit de réalités expérimentales universelles. La seconde évidence est qu’il y a des incidents parce qu’il y a des règles sous-jacentes, implicites ou explicites. Toute personne « victime » d’un incident estime en effet qu’une règle a été enfreinte à son détriment. La troisième évidence est que le moyen le plus sûr d’alimenter le cercle vicieux de la dégradation consiste à ne pas réagir aux incidents.

La question pratique essentielle est donc de savoir qui doit réagir et comment.

A moins d’être « un sale con certifié », les fauteurs de troubles ont rarement conscience des dommages collatéraux qu’ils provoquent et de l’étendue de leurs conséquences. L’expérience montre donc que seules les « victimes » d’incidents peuvent réagir efficacement, tout simplement parce que personne d’autre ne peut le faire à leur place. Mais elles ne peuvent se livrer à cet exercice difficile qu’à la condition d’être suffisamment sécurisées.
Un environnement de travail où chacun peut s’appuyer sur des règles, indiscutables et applicables à tous offre cette sécurité. Les règles implicites de bon sens, auxquelles toute personne de bonne foi est supposée adhérer ne suffisent pas. C’est au management qu’il appartient de préciser de façon explicite les règles applicables et de s’engager fortement à les faire respecter.

Un patron avait coutume d’alerter ses collaborateurs sur le syndrome du « c’est pas grave ». Ce qui est grave, disait-il, c’est de ne pas réagir rapidement à nos dérives de fonctionnement parce que là se trouvent les causes principales de nos pertes d’efficacité.

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Piranhas et poissons rouges

L’entreprise est parfois comme un bocal plein de poissons rouges, où nagent quelques piranhas. Ces derniers ont une réputation peu flatteuse. Prédateurs carnassiers à la mâchoire puissante, ils aiment prospérer aux dépens des proies innocentes qui ont la malchance de croiser leur chemin. Dans l’entreprise, ce sont les « sales cons certifiés » qui pourrissent l’existence de leurs collègues, mais aussi les magouilleurs et « parasites » qui détournent volontairement les règlements à leur profit, désorganisent sciemment le fonctionnement des équipes et plombent les résultats de l’entreprise.

Même quand ils sont très peu nombreux, leur capacité de nuisance est suffisante pour obséder certaines Directions d’entreprise avec cette question lancinante : « comment s’en débarrasser ? »

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La première tentation consiste à partir à la chasse. Il faut plonger dans le bocal avec son masque et son tuba, se mettre à l’affût et au hasard des rencontres, viser et tirer avec son fusil sous-marin. Le résultat est loin d’être garanti car la cible est méfiante, mobile et très agile. Il faut donc beaucoup de temps et beaucoup d’énergie pour garnir le tableau de chasse. Et pendant ce temps là, on ne s’occupe pas des poissons rouges… et les piranhas se reproduisent … C’est Sisyphe sous la mer…

Cette stratégie est donc coûteuse et perdante. La stratégie gagnante repose sur une simple observation. Les piranhas aiment l’eau trouble. C’est d’ailleurs une condition essentielle de leur survie. Ils ont besoin d’eau trouble pour évoluer à leur aise, se faire prendre pour des poissons rouges, faire leurs mauvais coups et disparaître aussitôt pour échapper aux poursuites. Pour les éliminer, il suffit donc de clarifier l’eau du bocal. En permanence à découvert , ils seront de plus en plus mal à l’aise et isolés. Et ils ne pourront supporter longtemps d’apparaître tels qu’ils sont. Ce sera la cause principale de leur fuite, voire de leur perte.

Si donc vous avez des piranhas dans vos équipes, assurez-vous que vos règles de fonctionnement sont suffisamment claires et applicables avant de partir en guerre contre eux. Clarifiez l’eau de votre bocal !

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Pouvoir de direction et contre-pouvoir syndical

Que faire quand le témoin d’huile de votre voiture se met à clignoter ? Vous avez le choix entre trois attitudes possibles. Première attitude, vous refusez d’en tenir compte et poursuivez votre route. Si le témoin continue de vous gêner, vous vous arrêtez, cognez sur votre tableau de bord jusqu’à l’extinction du fichu voyant et reprenez votre route…Seconde attitude, vous vous arrêtez parce que le manque d’huile vous inquiète. Et vous versez de l’huile sur …votre tableau de bord…et son témoin récalcitrant. Troisième attitude enfin, vous vous arrêtez, vous complétez le niveau d’huile du moteur et reprenez votre route, tout en notant de faire vérifier la consommation d’huile par un homme de l’art…

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Absurde ? Pas tant que cela quand on observe les relations entre Direction et Organisations Syndicales dans certaines entreprises. La première attitude correspond à une politique anti-syndicale, une lutte pour le pouvoir dont la finalité est la liberté de mouvement pour la Direction par la réduction au silence de l’adversaire syndical, voire son élimination. La deuxième attitude est une recherche d’achat de la paix sociale par  »en haut », par l’octroi d’avantages divers et variés aux interlocuteurs syndicaux en vue d’obtenir leur collaboration ou leur silence. La troisième attitude est faite d’écoute et d’intérêt pour les vrais problèmes de fonctionnement, en vue de les résoudre en s’attaquant à leurs causes.

On entend souvent dire que tout pouvoir a besoin de contre-pouvoir pour en limiter les abus, et que dans les entreprises le contre-pouvoir le plus approprié serait un syndicalisme qualifié de fort. C’est oublier un peu vite l’ensemble des contraintes de toutes sortes qui s’imposent aux dirigeants et qui en font tout sauf des monarques absolus. C’est surtout oublier que le contre-pouvoir le plus naturel au pouvoir est l’exercice de la responsabilité, qui tend à rendre son détenteur naturellement prudent.
Dans notre exemple ci-dessus, le pouvoir de direction de la voiture appartient au conducteur. C’est lui qui fixe la direction à suivre, règle la vitesse et le régime moteur en tenant compte du code de la route, des conditions de circulation etc. C’est lui qui répond des conséquences de la bonne conduite comme de la mauvaise. Face à une alerte de fonctionnement, c’est à lui d’évaluer la situation pour prendre la meilleure décision. En cas de mauvaise décision, c’est lui qui paiera la facture.

Le rôle du témoin d’huile (syndical) est d’alerter, pas de prendre le volant. Il est donc d’alerter à bon escient, ce qui suppose d’être assez crédible pour être écouté et faciliter la conduite à bon port du véhicule et de ses passagers. Certains observateurs pensent que ce serait un progrès de donner plus de pouvoir au témoin d’huile. Mais dans quel but ? Copiloter ? Arrêter la voiture ? Ce serait évidemment s’enfermer dans une impasse dialectique aux résultats stériles garantis.

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Etre chef, est-ce grave ?

 »Vous êtes chef ? ce n’est pas si grave ! » Sous ce titre réconfortant, Michel Soriano propose un livre concret destiné aux apprentis managers. Comme tout métier, le management nécessite un apprentissage. Mais comment apprendre ? Pour l’auteur, l’enjeu principal consiste à acquérir de bons réflexes. En effet les exigences de réactivité et de rapidité qui s’imposent aux managers devraient les obliger à développer leur capacité à avoir la bonne attitude en toute circonstance. La vie quotidienne faite d’action et de prise de décision laisse peu de temps à la réflexion. Agir juste exige donc d’avoir réfléchi avant aux aspects fondamentaux de son métier, pour être à l’aise ensuite dans l’action. Michel Soriano propose une méthode qui allie réflexion managériale et mise en pratique.

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Les 100 règles proposées sont induites de l’expérience personnelle de l’auteur et, pour une part, inspirées des apports du CPE. Elles sont le plus souvent illustrées à l’aide d’anecdotes vécues, ce qui rend la lecture plaisante et concrète : pas de théories, mais beaucoup d’exemples qui montrent que respect des personnes et efficacité vont de pair !
Certaines concernent directement le comportement et les attitudes personnelles (le courage, le parler vrai, la bonne humeur, la rigueur et l’intransigeance…) D’autres ont un caractère politique et s’intéressent aux conditions à réunir pour mobiliser les énergies dans la durée (la nécessité de règles communes applicables à tous, l’équilibre entre pouvoirs et responsabilités, le devoir de sanctionner positivement et négativement…)
Il est intéressant de noter que ces 100 règles se sont révélées aussi pertinentes et fécondes dans des secteurs d’activité aussi différents que l’agro-alimentaire, la fonderie ou la papèterie. Ce qui tendrait à prouver que le management des personnes est bien un métier à part entière, fondé essentiellement sur la compréhension de la nature humaine et du fonctionnement des organisations.